Le matin s’était levé en montrant son éveil par l’éclat intense du soleil qui incitait la population de Camelot à ouvrir les rideaux ainsi que les fenêtres. Une nouvelle matinée commençait et pour la majorité des habitants, elle serait aussi banale que hier. Aujourd’hui, il n’y aurait aucun évènement assez spécial pour retenir l’attention de tous. La routine reprenait doucement alors que les agriculteurs bêchaient déjà sur la plaine, alors que le forgeron du château reprenait son labour. A l’intérieur du château, le monde qui le peuplait commençait aussi à s’activer ; les servants venaient apporter le petit déjeuner dans la chambre de leur maître et maîtresse et ces derniers réfléchissaient à ce qu’ils pourraient bien faire de leur journée. Toutefois, certaines avaient une tendance à arriver en retard et ce fut le cas pour une malheureuse jeune fille qui avait oublié de se réveiller, suscitant alors l’agacement de la nièce du Roi. La princesse était du genre très patiente mais aimait que tout soit correcte. Si sa servante se mettait à arriver en retard, alors elle devrait de moins en moins la tolérer. Quand la servante fut arrivée, Elena s’était déjà vêtue d’une robe bleue marine et avait attendu sagement devant la fenêtre, en contemplant le petit monde qui travaillait déjà. Et lorsque cette dernière termina son petit déjeuner (non sans avoir sermonner la domestique !), elle s’empressa de quitter sa chambre en laissant le soin à sa subordonnée de faire son lit et d’aérer la pièce. Après tout, c’était son travail et elle était payée pour cela.

Traversant le couloir qui menait à ses appartements, Elena Pendragon eut l’impression d’avoir oublié quelque chose mais il fut trop tard pour se retourner. Quelque chose la chipottait mais elle ignorait la cause de tout cela. Il lui arrivait pourtant d’avoir des impressions étranges comme celles-ci mais cette fois-ci, c’était forcément un oubli. Mais elle n’avait pas envie de retourner sur ses pas, souhaitant s’en rappeler un peu plus tard. Elle descendit les escaliers avec grâce et lorsqu’elle arriva au rez de chaussée, elle tenta d’éviter la salle d’audience en s’avançant furtivement vers l’autre bout du château. Elle n’avait pas vraiment envie de saluer son oncle, ni Arthur ou ni Dame Morgane. Surtout son oncle avec qui elle jouait l’hypocrite pour mieux parfaire ses plans qui prendraient bientôt effet. Une question de temps, comme elle le pensait. Quoi qu’il en soit, elle préférait s’isoler un peu des gens, préférant rencontrer la rosée du matin près de la forêt qui entourait le royaume. Là-bas, elle se sentait beaucoup plus libre et moins oppressée. Il s’agissait là d’un sentiment qui ne l’avait jamais quitté depuis toute petite. Dehors, une petite brise l’accueillit et elle sentit soudainement les regards des habitants se tourner vers elle. D’habitude, on la voyait peu souvent sortir de la cour et on croyait qu’elle restait sagement enfermée dans sa chambre, à se pomponner. Mais ce n’était qu’illusion que seuls les plus fins observateurs et les veilleurs de nuit pouvaient détourner. Elle parvenait à sortir de sa chambre mais avec une grande discrétion digne d’un voleur. Néanmoins ce matin, elle ne voyait pas l’ennui à se faire remarquer par la population. Une petite fille accourut d’ailleurs vers elle et lui tendit une marguerite tout en la regardant de ses yeux brillants. Des yeux qui auraient pu signifier plusieurs choses ; une requête qu’elle souhaitait faire ou bien symboliser son respect pour la princesse. Cette dernière, qui fut alors arrêtée sur sa route, ne sut que faire durant plusieurs secondes avant d’afficher un sourire et de prendre la fleur. Elle la remercia et l’observa repartir en jetant des petits coups en arrière. Finalement, elle n’avait pas de requête à lui faire part. Elena reprit son chemin, le regard droit, l’allure assez hautaine. Lorsqu’elle passa devant les deux gardes qui veillaient aux entrées et aux sorties des gens, elle ne leur adressa aucun salut. Non, ils n’étaient que des gardes après tout, qui passaient leur tout à rester immobile ou à reprendre tout habitant ne respectant pas les règles. La demoiselle passa sans aucun problème et accéléra le pas pour rejoindre l’antre de la forêt.

Le périmètre qui entourait le château ne contenait aucun danger, ce qui en conséquences, permettait de pouvoir faire des petites balades. Mais au-delà de ce périmètre, seuls les guerriers pouvaient se sentir apte à fouler l’herbe et à affronter tout danger potentiel. Si les gens accédaient à la forêt, on ne pouvait pas contrôler leurs faits et gestes mais on savait pertinemment que la peur les rendaient hésitants quant à une tentative d’aller plus loin. On se fiait à cette peur. Une peur qui venait des légendes que l’on racontait sur des monstres qui sortaient le soir ou en journée pour dévorer tout humain se déplaçant près de sa tanière. La plupart du temps, on y croyait puisqu’on prenait connaissance de ces histoires lorsque l’on était enfants. Toutefois, Elena était déjà sortie de cette forêt de nombreuses fois et n’avait jamais rencontré trop de problèmes avec des bestioles. Disons qu’elle était surtout entrée en litige avec des autres peuples humains mais cela n’avait plus d’importance désormais. Ralentissant le pas, la blondine s’immobilisa près d’un rocher qu’elle inspecta minutieusement. Il ne fallait pas qu’elle se salisse ni qu’elle s’arrache un bout de tissu. Constatant peu après que ce rocher était plus ou moins potable, elle s’assit dessus en veillant à ne pas frôler les feuilles mortes qui étaient tombées des arbres voisins. Et elle tourna le regard sur le côté, pour contempler le vaste territoire forestier. La belle se sentait seule et pourtant, elle aimait cette solitude matinale qui la coupait un peu de son côté sociable habituel. Le changement, il n’y avait rien de mieux que cela pour éviter la routine. Entre l’épais feuillage de deux arbres, un trou s’était formé et on y percevait une petite vue des plaines où les agriculteurs entretenaient la nourriture qu’ils cultiveraient par la suite avant de les distribuer à Camelot. Un dur labeur certes, surtout que la récompense en ors n’étaient pas forcément énorme.

Ces habitants possédaient un savoir que les nobles n’avaient pas ; le savoir vivre dans la pauvreté, les notions de survis ainsi que de l’expérience. Ils n’avaient pourtant rien à être enviés mais ils étaient bien plus doués en pratique que la majorité des nobles vivant au château. Des nobles qui passaient leur temps à ne rien faire, à ouvrir la bouche pour se vanter, critiquer ou bien de tancer les domestiques. Elena était de ce monde et pourtant, elle y voyait du bon. Selon elle, son monde apportait aussi un certain savoir plutôt comportemental. Il lui était déjà arrivée d’avoir involontairement écouté les caprices de Jane de Bragone, perdant un défi verbal contre Arthur et cela lui avait vraiment ouvert les yeux à propos de l’inutilité de certaines personnes dans Camelot. Du moins, cette fille pouvait être utile pour décorer une salle de par sa beauté.

Les pensées d’Elena furent réduites à néant. Son cœur s’était mis à battre un peu plus rapidement alors qu’elle avait l’impression qu’une présence approchait. Elle n’aimait pas tellement cela, alors qu’elle était seule avec l’idée en tête qu’on l’avait suivie. N’étant pas du genre paranoïaque, elle songea durant un instant que le danger avait pénétré le périmètre du royaume.

« - Qui va là ? »